C'est comme si j'avais un peu repris l'école, qu'on écrivait nos prénoms sur des feuilles A4 pliées en triangle et que mon corps se fatiguait tout seul de rester assise à gribouiller pendant 8 heures presque d'affilée. Comme si la lune et les étoiles se laissaient pas voir pour que nos souvenirs soient plus vifs et plus drôles, comme si les méduses apparaissaient seulement au crépuscule pour que tu repartes avec une petite blessure de guerrière et un souvenir rose, flottant dans une odeur de pluie et de fleur.
Au milieu des tournants à 95 degrés et des déserts superlunaires, la vie se déroule presque tout en douceur, tout en nuances.
Il y a toujours le tellement intriguant de ce qu'il va se passer alors qu'on prend un coup de vieux avec nos cycles semi-longs ; et en même temps on apprend petit à petit à réaliser la coolitude du maintenant et de ces riens du quotidien.
C'est peut-être à cause de la mer, de la lune, des couleurs ou de la lumière, de la musique ou des sandwichs syriens, de l'altitude, de l'urbain et des reflets clandestins, du vent et du temps, mais surtout des gens, de nos conversations, de leurs regards, de nos rêves et nos présents communs. Doucement ce glissement te fait réaliser ce qu'il y a de beau dans le mouvement - comme sur un vélo, en avançant on trouve l'équilibre.
On a dit au revoir aux tatamis, on a de nouveau repoussé le confort à plus tard, c'est le retour au choses essentielles, concentration sur les besoins primaires.
C'est presque pas mal, l'austérité matérielle du moment est un noir et blanc qui fait ressortir toutes les couleurs de l'intangible, si on y pense.
On refait le monde dans une cuisine adéquatement étriquée, on devient secrets comme nos courages s'envolent des balcons du 16ème, on imagine en regardant la lune que les choses peuvent être différentes - c'est à nous de miser.
Nous sommes mi-septembre - pas de panique.
On construit des madeleines de Proust à base de pesto du jardin et de bo buns aux bols dépareillés, de journées à ne rien faire, de dialogues sans fin et de films juste entamés, de Balavoine et de coriandre encore et toujours. C'est un peu comme un remède à l'angoisse de l'aventure, de la psychanalyse appliquée quand avec la pluie l'humanité déteint sur nous.
Le corps fatigué d'aux revoirs trop matinaux, le coeur triste de séparations trop rapides, c'est le moment de trouver les nuances de ciel entre les nuages.
Ça se passe sur un fond de moments de bonheur sincère : les parties de kem's en mode golden, la mer tous les matins différente, les séances ciné allongés sur un tatami de récup, les galettes et les panisses, les siestes et les visages heureux, la douceur de vivre et les grandes conversations, les nouvelles du bout du monde, le jardin, les balades à deux roues, le ciel d'étoiles et de lumières flottantes.
C'est ce qui est déconcertant parce que les horizons sont ouverts, parce qu'on a déjà été courageux et que c'est encore le temps de rêver.